Jour 105 à 108: l’entrée dans les Pyrénées avec papa et marcher en bonne compagnie

Jour 105: les Pyrénées, il faut les mériter

Après deux jours de repos, il est maintenant temps de reprendre le sentier. La journée d’aujourd’hui s’annonce assez rude avec un 2000 mètres de dénivelé positif sur 24 kilomètres.

Tout d’abord, nous disons au revoir à ma maman qui commencera un voyage en solitaire d’une semaine, où elle en profitera pour aller voir une amie suisse qu’elle n’a pas vu depuis 25 ans! Cela risque d’être une réunion riche en émotions. Je dis au revoir, le cœur gros à maman, car la semaine avec elle a filé comme une étoile filante. On convient de se retrouver à Toulouse, quelques jours avant son départ,  pour qu’on puisse se revoir une autre fois avant son retour à Montréal.

Suite à notre au revoir, mon père et moi nous rendons dans la petite épicerie de Vinça, afin de faire un ravitaillement. Puisque je ne sais pas encore à quelle vitesse mon papa marchera, nous prenons un jour de nourriture supplémentaire (je déteste avoir faim et je suis incapable de me rationner). Le sac risque d’être très lourd avec un total de 5 journées de ravitaillement. Mais comme le dit Obélix, « quand l’appétit va, tout va ». Avec nos lourds sacs nous nous mettons finalement en route vers 9h00. C’est parti pour une superbe aventure de plein air père/fille!

Depuis hier soir, je discute avec Robin et Valentine via les réseaux sociaux. Initialement, Valentine avait pris la décision d’arrêter de marcher et de ne pas entrer avec nous dans les Pyrénées, mais la nuit lui a porté conseil comme on le dit, et elle a décidé de continuer. Je suis vraiment heureuse de sa décision, car la météo s’annonce incroyable et elle pourra voir des paysages magnifiques. Nous décidons de nous rejoindre plus loin dans le sentier pour bivouaquer ensemble.

Le sentier commence assez graduellement, alternant des routes asphaltées et des petits chemins de campagne. Cette facilité ne dure toutefois pas très longtemps et rapidement nous faisons face à un premier mur nous menant à Baillestavy.

Baillestavy alias Baille ta vie 😉

Nous continuons notre ascension jusqu’à un petit village où nous prenons une pause, le temps d’un café. L’ascension est rude avec nos énormes sac-à-dos et en raison de la chaleur. Pour un premier trek (et un énorme sac-à-dos), marche avec brio!

On profite d’une pause café avant de remonter

En milieu d’après-midi, j’entends des voix familières, un peu plus loin dans la trail. Une minute plus tard, je vois Robin et Valentine, assis dans l’herbe en train de faire une petite pause. Apparemment je parle fort (oups), et ça fait quelques minutes qu’ils m’entendent approcher. La compagnie formée, nous repartons tous ensemble à l’assaut de la montagne. Plus nous prenons de l’altitude, plus le vent se fait sentir.

En fin de journée, nous arrivons à notre lieu de bivouac souhaité. Malheureusement, le refuge non gardé est barré à clé, donc nous plantons nos tentes aux alentours. Il y a très peu de places, nous devons nous serrer. Peu de temps après, trois randonneurs nous rejoignent en nous faisant comprendre que nous n’avons pas vraiment le droit d’être là (en fait, à leur ton, on comprend que c’est totalement permis, mais qu’ils souhaitaient eux-mêmes s’installer dans l’endroit).

Après un bon petit repas, on rentre rapidement dans notre tente car dès que les rayons de soleil disparaissent, il se met à faire très froid. Alors que nous pensions que notre campement était un peu isolé du vent, ce dernier tourne et souffle directement sur nos abris de toile. Des rafales à 80 km/h compressent ma tente. Ça risque d’être une courte nuit !

Petit souper en bonne compagnie
Notre petit village de tentes
Coucher de soleil de notre bivouac

Vers 23h00, je n’arrive toujours pas à m’endormir alors que ça fait déjà 2 heures que j’ai fermé les paupières. Croyez-le ou non, nous sommes à des dizaines de kilomètres de la ville, et pourtant, on est à côté d’un party! Des randonneurs ont élu un endroit à une centaine de mètres de notre campement pour faire jouer de la musique et hurler sans aucune raison. Merci le respect!

Vers 2h00 du matin, je réalise que ce sera probablement une nuit blanche pour moi. Il m’est tout simplement impossible de rejoindre le pays des rêves. Ce manque de sommeil risque de rendre encore plus complexe l’ascension prévue demain du célèbre Pic du Canigou!

Jour 106: monter le Canigou après une nuit blanche

Après une incroyable nuit de non-sommeil, mon alarme finit par sonner. C’est un soulagement car j’ai passé la nuit à tourner en rond dans mon sac de couchage et à attendre un sommeil qui n’est jamais venu. On mange chacun dans notre tente car il fait beaucoup trop froid pour s’installer dehors sur une table.

Après un bon petit (trop petit) déjeuner, on repart en direction du Pic du Canigou. La dernière partie de la montée est dénotée T4 en difficulté, ce qui exige généralement l’utilisation des mains pour escalader certaines parties.

Avant d’entamer cette ascension, nous prenons une petite pause au refuge des Cortalets, abri élu par de nombreux randonneurs voulant gravir un des sommets les plus mythiques de Catalogne. On croise un joyeux groupe d’une dizaine d’enfants d’environ 5 à 8 ans qui partiront en excursion au sommet de la montagne! Il existe deux itinéraires pour s’y rendre, un évitant le passage T4 ce qui fait en sorte que ce dernier est accessible aux familles. l’Hexatrek a toutefois préféré passer par l’itinéraire difficile (surprise). Nous arriverons donc au sommet par une autre direction.

Après une tarte, des biscuits et un café, nous repartons vers le Canigou, en passant par le magnifique col de la Portella de Callmanya. À la moitié de la montée, nous devons nous arrêter afin de mettre des vêtements plus chauds en raison du vent glacial qui souffle sans arrêt.

C’est parti pour le Canigou !
On commence à voir le Canigou sur la droite
Vue depuis la Portella de Callmanya avec mon papou et moi

Passé le col de la Portella de Callmanya, nous déposons nos gros sac-à-dos et préparons l’ascension finale dans la cheminée menant au sommet. Afin de grimper jusqu’au pic du Canigou, il faut faire un aller-retour et sortir un peu du sentier de l’Hexatrek. Nous ne voyons donc pas l’utilité d’apporter tout notre matériel, et nous préférons voyager léger afin d’avoir un meilleur équilibre pour progresser dans les gros pierriers verticaux qui nous attendent.

Marcher sans sac-à-dos est une sorte de délivrance, c’est tellement plus facile, on a presque l’impression de s’envoler. La première partie de la montée finale est assez facile, mais elle se corse dans les derniers 100 mètres. En effet, cela devient de l’escalade (bon pas une V6, mais quand même). Mon papa prend la décision de nous attendre pour cette dernière partie, et je repars avec Robin et Valentine en faisant très attention où je pose les pieds.

Le mur de l’ascension finale
Il ne faut pas perdre pied ici!

Après une quinzaine de minutes d’effort vertical, on parvient au sommet… Qui est déjà rempli avec au moins 40 randonneurs! Mais bon, il fallait s’y attendre, nous sommes samedi midi, et les conditions météorologiques sont tout simplement parfaites. Il n’y a même pas un seul nuage dans le ciel.  Au sommet un groupe de catalans chantent leur hymne national et reçoivent une ovation à la fin de leur prestation. Nous prenons quelques photos, puis redescendons.

Let’s go, on a réussi!

La descente s’avère un peu plus complexe. Non pas en raison de la difficulté technique, mais plutôt de certains randonneurs qui se croient seuls au monde. Un premier (de type, m’as-tu vu)  scande à tout le monde qu’il effectuera la descente en courant, que c’est facile et blablabla. D’accord, bravo mon grand. D’autre part, quelques minutes après avoir commencé notre  descente, un randonneur plus haut que nous échappe trois roches (et pas des petites) qui dévalent et qui passent à quelques centimètres de ma tête. L’erreur est humaine et facile dans ses roches glissantes, mais au lieu de s’excuser, il commence à rire. Éclairez-moi à ce sujet, mais je ne sais pas ce qui est comique d’ avoir presque fracassé le crâne d’une personne dans un couloir précaire. Valentine n’en revient pas de cette bêtise et se met à les engueuler. Je leur dit à mon tour d’attendre que nous soyons plus loin d’eux avant qu’ils continuent leur descente.

On s’en sort finalement en un seul morceau et nous rejoignons mon père. Vers 13h30, nous atteignons nos sac-à-dos que nous avions laissés dans un petit endroit prévu pour du bivouac. Ouf, tout notre matériel est encore là! C’est toujours un peu stressant de laisser nos sacs au nez de tout le monde, et on ne peut qu’espérer que personne ne sera assez méchant pour voler une partie du contenu.

Affamés, nous engloutissons notre repas, puis entamons une longue descente jusqu’au sympathique refuge des Mariailles qui s’avère être assez humoristique. Dans les toilettes, on y  retrouve un panneau des commandements de la crotte avec toutes les types de chiottes expliqués de façon très élégante (je vous laisse la photo, vous en jugerez par vous-même). Nous prenons un bon repas accompagné d’un peu trop de vin rouge. Étant très fatigués, disons que Robin, mon papa et moi, ne tardons pas à être pris de fous rires pour des riens. Ça fait un bien fou de rire autant après une nuit sans sommeil et une journée exténuante!

Les différents types de crottes
À côté du refuge gardé se trouve également un refuge non gardé magnifique

Même si initialement, nous pensions dormir dans le refuge non gardé, des joyeuses crottes de souris dispersées un peu partout dans le refuge nous font changer d’idée. Nous montons donc notre tente dans les dernières lumières à l’endroit de bivouac désigné.

Spot de bivouac pour la nuit

N’ayant pas dormi durant les dernières 36 heures, je ne tarde pas à trouver rapidement le sommeil.

Jour 107: marcher contre le vent et sous de drôles de nuages

Le lendemain matin, après une très bonne nuit de sommeil, nous retournons dans le refuge gardé afin d’acheter un café, puis nous reprenons notre chemin. Aujourd’hui, nous marcherons quelques kilomètres sur la mythique haute route des Pyrénées. Plus loin dans l’étape 5, il sera possible de faire une grande variante, considéré comme la plus difficile de l’Hexatrek, afin de continuer sur cette route.

Le principal obstacle aujourd’hui est le vent. Heureusement que nos sacs sont encore très lourds car des rafales à 100 km à l’heure nous assène régulièrement. Rapidement, on doit se vêtir plus chaudement, puisque la température ressentie est de 0 degrés. Euh, il est où mon été indien?? Afin de ne pas me transformer en glaçon, je suis obligée de mettre l’ensemble de mes vêtements.

Ces forts vents ont toutefois un grand avantage: ils permettent la formation de nuages spectaculaires dans le ciel. Certains nuages laissent presque penser que des ovnis sont prêts à débarquer sur la Terre.

Des nuages spectaculaires
Fait froiiiiiiiid

Le sentier est extrêmement sauvage, et dans la journée, nous ne croisons qu’un nombre minime de randonneurs. Les températures assez extrêmes, surtout pour un mois de septembre,  nous empêchent de pouvoir dîner dehors sans se geler les doigts. Nous continuons donc à marcher jusqu’à attendre un petit abri non gardé en tôle. Même si ce dernier est assez rudimentaire, il nous permet de nous mettre à l’abri du vent le temps de manger.

Paysages grandioses, mais isolés
Les ovnis débarquent sous peu

En fin de journée, nous atteignons la station de ski Vallter 2000, où nous arrivons quelques minutes avant la fermeture d’un restaurant. Nous en profitons pour rechercher un peu nos batteries, manger de bonnes crêpes au chocolat et se réhydrater. Après une bonne pause d’une heure, nous repartons en direction du gardé Refuge Ulldeter, où nous passerons la nuit. Puisque la saison estivale est terminée, le refuge est officiellement fermé depuis quelques jours, mais chacun d’eux se voit dans l’obligation de laisser une partie ouverte pour les randonneurs hors saison. Généralement, quelques couchettes sont disponibles à l’abri des vents. Nous en aurons bien besoin cette nuit, car il annonce encore des rafales de vents à 120 kilomètres à l’heure.

En direction du refuge, nous croisons un cheval qui semble aux premiers abords, très sympathique. Il s’approche de mon père afin de recevoir quelques caresses. Puis, il s’approche de Robin… Et tente de mordre ses couilles! Robin recule juste à temps. Ouf, il faut se méfier de ses chevaux là !

Le cheval mordeur de couilles

En fin d’après-midi, nous arrivons finalement au refuge. La partie du refuge encore ouverte permet d’accueillir environ 6 randonneurs. Ça tombe bien, car lorsqu’on arrive, déjà deux personnes y sont installées. On fait leur connaissance, on partage un repas avec eux, puis déjà, c’est le temps d’aller se coucher.

Jour 108: une journée sur les crêtes

Le lendemain, le réveil sonne dès 6h00. Nous avons une longue journée devant nous, avec un bon 27 kilomètres à parcourir. Le point positif est que nous arriverons dans une ville où nous pourrons acheter de la bonne nourriture. Cette journée promet: nous passerons par plus de 6 cols aujourd’hui et le soleil devrait être au rendez-vous! Heureusement que les conditions météorologiques sont bonnes, car nous passerons par le Pic du Noucreus, qui a déjà été témoin de malheureux drames liés à la foudre. Il est donc impératif d’y passer une journée où il n’y pas d’orages.

En partant à 7h00 du matin, nous sommes témoins d’un spectaculaire lever de soleil. Le ciel se remplit de couleurs, et il est difficile de détourner les yeux de ce spectacle du ciel.

Un magnifique lever du soleil qui restera gravé longtemps dans ma mémoire

Après une forte montée, démarre une grandiose journée à l’assaut des crêtes et des cols. Le soleil domine le ciel, nous avons des vues à 360 degrés, tout est parfait. Nous nous sentons incroyablement chanceux de pouvoir évoluer dans de tels décors.

Une journée sur les crêtes
Des vues à 360 degrés
Le quatuor des Pyrénées au Pic des Nou Fonts

La dernière grande montée de la journée, soit l’ascension du Pic des Nou Fonts, m’arrache de fortes douleurs au tendon d’Achille gauche. Cela m’inquiète un peu car ça fait longtemps que je n’ai pas eu aussi mal, mais il faut dire également que la dernière ascension a été faite sur une pente extrêmement raide. Je décide toutefois de ralentir le rythme afin de ne pas empirer l’état de mon tendon. Heureusement, il ne reste plus que quelques mètres de dénivelé positif et le restant de la journée se compose davantage de longues descentes et de plat.

Ils sont en feu 🔥

Puisqu’il annonce assez froid cette nuit, nous avons décidé de louer un Airbnb à Super Bolquère (je vous jure ça s’appelle vraiment comme ça). Après une longue descente, nous arrivons à Eyne, où nous devons encore faire un bon 7 kilomètres de plat avant d’arriver à notre logement pour la nuit. Mon tendon est de plus en plus douloureux, et ça m’inquiète de plus en plus.  J’en fait part à Robin et Valentine, et on convient de se rejoindre à l’appartement puisque je vais ralentir énormément mon rythme.

Remake de l’album des Beatles

Deux heures de marche plus tard avec mon papa, je peux enfin poser mon sac. Ne pouvant plus vraiment marcher, je reste dans l’appartement tandis que mon papa, Robin et Valentine vont faire les courses dans un magasin situé à 2 kilomètres de l’appartement (heureusement, ils sont pris en stop).

Le soir nous savourons un bon poulet rôti et des pommes de terre (ça fait changement des pâtes et saucisson). Ça fait quand même du bien du confort de temps à autre ! Dans les prochains jours, nous nous attaquerons au magnifique Pic du Carlit!

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