Jour 69: le retour d’Hugo!
Après une nuit d’un sommeil un peu douteuse (j’aurais dormi des heures de plus, et sur un sol un peu plus égal), je plie la tente (façon de parler, j’ai peu de minutie à l’égard de mon rangement et ma tente termine généralement en boule dans le fond de ma pochette de côté) et je décolle vers 8h30. Dès les premiers kilomètres, j’ai la chance de marcher sur le haut d’une crête et d’avoir une vue en 360 degrés sur les environs.
Après une longue descente, je m’apprête à me diriger vers le refuge de la Lai, quand j’entends: « Charlottteeee ». Je me retourne pour localiser l’origine de la voix et qu’elle n’est pas ma surprise quand j’aperçois Hugo attablé à un petit restaurant! Hugo est un HexaTrekeur que j’avais rencontré au jour 2 de mon aventure. Puisqu’à ce moment j’étais blessée, j’avais été contrainte de prendre quelques jours de repos et je ne l’avais pas encore recroisé. Par grande malchance, quelques semaines plus tard, ça été à son tour de devoir prendre une pause de trois semaines à cause d’une périostite tibiale. Je suis donc super heureuse de pouvoir enfin le retrouver ! On a commencé exactement le même jour notre randonnés, à quelques heures d’intervalle seulement, donc c’est super de pouvoir se revoir. Je lui indique l’endroit où je pense camper et on convient de se retrouver là-bas en fin de journée. Pour le moment, il doit encore rester sur place afin de saluer un ami qui l’a accompagné pour les trois dernières journées.
Au préalable, je voulais faire une journée d’environ 32 kilomètres, mais les 2900 mètres négatifs ainsi que le fait que Robin, Scott, Lauren, Valentine et Hugo semblent avoir comme objectif le même endroit de bivouac, me font décider de me rabattre sur un 21 kilomètres. Comme soudainement j’ai beaucoup plus de temps devant moi, j’en profite pour faire un petit détour ( allez quelques kilomètres de plus, pourquoi pas!) pour aller voir un lac marqué « immanquable » sur l’application mobile de l’Hexatrek.
Je ne suis pas déçue, les couleurs du lac sont incroyables! J’y fait une petite pause dîner.
Après un peu de repos, je me redirige vers le tracé officiel.
Le restant de la journée promet. En effet, je passerai aujourd’hui par le magnifique Lac du Presset. Enthousiaste, je me remets à marcher, sous une canicule qui hausse le défi physique, depuis plusieurs jours. Les paysages pour arriver au col sont magnifiques avec des rivières qui parsèment le chemin. Maintes fois, j’y trempe ma casquette afin de refroidir mon visage dégoulinant de sueur.
Après une longue ascension vers un col menant au refuge et au lac du Presset, j’arrive finalement au sommet. Les dernières centaines de mètres se sont effectuées sur des cailloux pointus et des névés. La vue du col compense largement l’effort physique, avec une vue splendide sur le lac alpin.
Une quinzaine de minutes plus tard, je vois Hugo arriver au loin. Je l’encourage et prends quelques clichés des derniers mètres de son ascension. Suit une petite descente bien raide d’une vingtaine de minutes qui mène à hauteur du lac. La vue y est renversante.
Cet endroit est magnifique, mais malheureusement en raison de la limite de 10 tentes pour le bivouac à proximité du refuge, nous ne pouvons pas y rester pour la nuit. Je décide d’y rester quelques heures, le temps d’une tarte au chocolat et noix de coco décadente, suivi de mon traditionnel repas de pâtes. Lauren, Scott, Valentine et Robin nous rejoignent, Hugo et moi, puis nous allons tous camper, 2 kilomètres plus loin à proximité du refuge de la Balme.
Jour 70 : course contre-la-montre, un bivouac et un piano
Le lendemain matin, je marche avec le quatuor, Hugo étant parti beaucoup plus tôt que nous. Nous avons un pas assez rapide puisque nous devons arriver avant la fermeture de l’épicerie à 12h30. On ne peut pas la manquer, nous n’avons plus de nourriture dans notre sac. Valentine et Robin sont des fusées de la descente. Pour ma part, je préfère de loin les montées !
Finalement, nous arrivons près de 30 minutes avant la fermeture. Affamés, nous sommes beaucoup trop enthousiastes face à la nourriture. Disons que la bonne étiquette est assez ébranlée après de nombreuses semaines sur la trail. On s’assoit à même le trottoir pour déguster notre pique-nique. Cela doit être assez drôle pour les passants nous voyant. Nous sommes en effet presque 15 randonneurs assis par terre, devant l’épicerie, mangeant de drôles de créations culinaires. Mon Sandwich inclut même des morceaux de chips pour ajouter du croustillant. On est loin de la gastronomie ici!
Après le repas, débute une nouvelle mission pour moi: trouver une nouvelle bonbonne de gaz afin de pouvoir manger chaud. Cela fait quelques jours que j’en cherche une, mais sans succès. Il y a un Intersport à une dizaine de kilomètres d’ici, mais je vais devoir sortir du sentier pour y aller ce qui me fera un détour. Heureusement, je trouve un bus qui peut me déposer dans les environs.
Puisque c’est la dernière journée sur le sentier pour Valentine, Robin, Lauren et Scott vont s’arrêter avec elle dans un camping proche de l’épicerie. Je leur dit donc au revoir et s’amorce mon périple pour trouver du gaz.
30 minutes de bus plus tard, j’arrive au magasin de sport. Évidemment, je n’ai pas pensé à appeler avant afin de m’assurer qu’ils ont du gaz. Nous sommes dans un coin de randonnée très populaire, alors pour moi, il est évident que je peux en trouver là. Évidemment, ce n’est pas le cas… Un gros détour pour rien! On me dit qu’il y a une pénurie dans le secteur et qu’il sera très difficile d’en trouver. Ça va être bon les pâtes froides dans les prochains jours ! Au moins, moi qui rêvais d’un café glacé, je vais être servie..
Un peu fâché, je fais du stop pour revenir dans le sentier et je me dirige vers l’endroit de bivouac (à côté du refuge de Rosuel) auquel Hugo, Roel et moi avons convenu de se retrouver.
Le refuge de Rosuel est magnifique et le personnel, fortement sympathique. Pour la somme de 4 euros, nous pouvons planter notre tente sur le terrain ainsi que utiliser les installations intérieures et extérieures. L’un des membres du personnel connaît bien l’Hexatrek puisqu’il a parcouru l’année passée les trois premières étapes. Il me donne plusieurs conseils et m’informe que le bivouac dans le parc national de la Vanoise est strictement réglementé. Il est seulement permis à proximité des refuges avec un quota de tentes par nuitée. Bon génial! Ça risque d’être compliqué les prochaines nuits, le parc étant très populaire. Les gens y réservent leur séjour des mois à l’avance. Cette technique pour nous est tout simplement impossible car nous savons rarement où nous serons plus de deux jours à l’avance.
Hugo et Roel me rejoignent quelques minutes après mon arrivée. Lorsque Roel réalise qu’il y a un piano dans le refuge, ses yeux s’illuminent. Musicien et professeur de musique, les occasions de jouer du piano sont rares sur le sentier. Il demande au gérant s’il peut jouer et s’installe devant l’instrument.
C’est un magnifique moment de pouvoir entendre du piano en direct, c’est tellement beau. J’en écouterais pendant des heures. C’est toujours super de découvrir les talents de nos camarades de sentier ! Suite à ce moment de piano, vient l’organisation des prochains jours, qui se complique en raison des normes de bivouac du parc. Après quelques appels à différents refuges, nous réalisons qu’il ne reste que quelques places au refuge d’Entre deux eaux, à 30 kilomètres d’ici. Avec tout le dénivelé à avaler, il faudra se lever tôt demain!
Jour 71: c’est parti pour une grosse journée !
Le réveil sonne vers 5h45, après une nuit beaucoup trop courte. Le manque de sommeil des derniers mois commence à se faire sentir de plus en plus. En randonnée, je dors entre 6 et 7 heures par nuit en moyenne. Pour un périple de quelques semaines mon corps peut bien l’endurer, mais sur plusieurs mois c’est plus difficile. C’est pourquoi à chaque 10 jours environ, je m’offre une journée de repos et j’en profite pour récupérer un peu d’heures de sommeil.
Les premiers kilomètres de la journée sont exténuant, en raison d’une montée raide et de ma lutte constante contre l’envie de me rendormir. Pour me motiver, j’écoute des épisodes du podcast « Les Baladeurs ». Dans ce balado, des aventuriers racontent leurs voyages extrêmes ainsi que leurs mésaventures. Cela permet de me distraire de la douleur.
Après une longue heure de marche, je prends finalement un bon rythme. De fabuleux paysages s’enchaînent. Le parc étant extrêmement protégé, l’achalandage est moins important que dans d’autres sentiers. Je me sens isolée de la civilisation.
Je contemple une nature sauvage inhabitée jusqu’à ce qu’apparaisse le merveilleux (à noter que ce mot est ici utilisé dans un contexte très sarcarstique) village de Tignes…. Ce dernier est une station de ski ultra touristique (même en été) et les multiples tours d’appartements à louer enlaidissent le paysage.
Le seul point positif de ce petit arrêt lunch dans ce village c’est que je trouve finalement une bonbonne de gaz…au petit prix de 11 euros la bonbonne (à cette somme, c’est peut-être un gaz magique qui fera cuire mes pâtes en quelques secondes ?).
Je mange avec Roel et Hugo, mais nous décidons de ne pas trop nous attarder sur place, car il y a encore une fois une probabilité d’orages en après-midi. Il nous reste encore un col à passer, donc il vaut mieux se remettre en chemin. Je me transforme en mode alerte orages. En quelques mots: je marche vite. Très vite. Un escargot dopé à 10 expresso. J’ai tôt fait d’atteindre le col de la Leisse qui se trouve à une altitude d’environ 2700 mètre.
Je continue à marcher et je passe devant plusieurs lacs alpins reposant au milieu de la vallée. Ici, interdiction totale de se baigner ! Il y a même des sigles stipulant de ne pas tremper les pieds. Après, vu l’état et l’odeur de mes charmants orteils, un petit trempage de pieds aurait bien vite fait rebaptiser le lac, le Lac Moisi (allez je rigole un peu, ils ne sont pas siiiiiii pires que ça).
Vers 15h00, nous arrivons au refuge du Col de la Leisse. Nous y restons un bon 3 heures, le temps que le ciel devienne plus clément, puis nous repartons en direction de notre refuge. Heureusement, il ne reste plus que 7 kilomètres dans la journée. Assez fébrile d’arriver à bon port , je distance Hugo et Roel sur les derniers kilomètres. Quand j’aperçois le refuge, je pousse un soupir de soulagement. Du repos, enfin!