Jour 72: magnifique Vanoise
Suite au bivouac au Refuge Entre-Deux-Eaux, une nouvelle journée magnifique s’amorce. Aujourd’hui, mini-journée de 12 kilomètres! Nous atteindrons Pralognan, un petit village avec un camping, et nous profiterons des installations pour relaxer.
Après une bonne montée, le sentier s’ouvre sur une vallée regorgeant de lacs alpins et de rivières.
Au refuge du Col de la Vanoise, j’en profite pour m’acheter un délicieux biscuit qui vient tout juste de sortir du four (on ne dit pas non à un tel délice). En voyant ce biscuit, Roel et Hugo me copient directement. J’ai l’air tellement ravie devant de dessert que les gens assis aux alentours doivent commencer à se poser des questions. Hiker life !
Après cette pause collation, il est temps de repartir en direction du fameux lac des Vaches (vous vous demandez ce qu’il a de si fameux?). Eh bien, en regardant le tracé de l’Hexatrek, on peut voir le sentier traverser le lac. Erreur? Eh non! Une série de pierres permet de passer en plein milieu de celui-ci. Ok, ma description est incompréhensible, je vous laisse quelques photos pour clarifier le tout.
Le lac est magnifique, mais oh combien populaire. Il doit y avoir plus d’une centaine de personnes qui s’agglutinent de part et d’autres des deux rives. Avec des chaises mécaniques à environ 3 kilomètres du lac, ce lieu devient très prisé pour les randonneurs d’une journée.
En raison de l’achalandage, nous continuons notre route sans s’arrêter. De toute façon, on aura bien le temps de se reposer au camping ! Entre-temps, Robin, Lauren et Scott m’informent qu’ils seront également dans le même village que nous ce soir. Plus on de fous, plus l’on rit! Ils arriveront assez tard dans la journée, puisque leur journée totalisera 37 kilomètres!
J’arrive au camping en début d’après-midi, et après avoir posé ma tente, je prends la direction de l’épicerie. Dans les villages touristiques, les denrées sont à un prix extrêmement élevé. Deux jours de ravitaillement me coûtent presque 40 euros.. Pour vous donner une idée, j’aurais payé environ 25 euros dans une épicerie régulière.
Demain, le départ ne se fera pas trop tard, car il annonce un gros orage vers 16h00. Cette futur journée marquera une occasion spéciale, soit l’atteinte de la barre des 1500 kilomètres.
Jour 73: première moitié d’Hexatrek validée et frousse orageuse
En me réveillant ce matin, je suis assez emballée à l’idée de passer la barre des 1500 kilomètres sur le sentier ce qui marquera la moitié de mon aventure sur l’Hexatrek! Au menu aujourd’hui, le Col de Chavière. Il n’y aucune difficulté particulière dans cette journée d’une vingtaine de kilomètres, hormis de lourds orages prévus à 16h00. Je veux donc passer le col avant 14h00 afin d’avoir un 2 heures pour redescendre pour ne pas être trop exposée. Je commence avec Hugo et Roel, mais je les distance assez vite, je me sens très bien aujourd’hui.
Après environ 5 kilomètres, j’atteins la fameuse barre du 1500 kilomètres. Je ressens plusieurs émotions: une certaine fierté d’en avoir fait autant, la réalisation que wow, je dois refaire tout ce que je viens de faire une deuxième fois, mais en même temps le sentiment que merde ça passe trop vite, le temps s’écoule et me file entre les doigts. Comme l’endroit où je me situe n’est pas très intéressant, je décide d’attendre le sommet du col afin de prendre ma petite photo souvenir des 1500.
J’arrive vers 11h00 au refuge de Peclet qui se situe à environ 3 kilomètres du col. Puisque j’ai marché assez rapidement ce matin, je ressens le besoin de faire une plus longue pause. De toute façon, j’ai encore le temps avant que la météo ne change. Présentement, le ciel est bleuté et on ne peut y déceler aucun signe d’orages à venir. Après 45 minutes, Roel me rejoint et je rallonge ma pause jusqu’à 12h30, le temps de manger et de lire un peu. Entre temps, Hugo et son ami ont préféré continuer vers le col et prendre une pause ultérieurement.
Roel et moi se remettons en marche en direction du Col de la Chavière. La première partie de la montée n’est pas très difficile, et nous arrivons dans une vallée de Cairns. Il y a littéralement des milliers de sculptures un peu partout, comme si c’était une tradition d’en ajouter une à chaque passage.
La dernière partie avant d’atteindre le sommet est ultra méga raide. Je monte de côté afin de ne pas infliger le coup fatal à mes tendons d’Achille à qui j’en demande déjà beaucoup.
La vue sur le col est magnifique. Nous prenons quelques photos, dont une avec un morceau de papier sur lequel j’ai gribouillé 1500 km. Il est déjà 13h30, nous décidons de ne pas trop trainer, car les orages ont été devancés à 15h00 ( ils sont rapides comme l’éclair… désolé une autre mauvaise blague). En effet, le ciel s’est lentement transformé dans la dernière heure. Les nuages prennent une forme de plus en plus menaçante.
Dans la descente, nous croisons Hugo et son ami en train de paisiblement manger leur repas. Je les averti que les orages arriveront plus tôt que prévu. Même si nous sommes plus bas que le col, nous sommes très exposé, étant dans une grande vallée ouverte.
Je continue la descente avec l’instinct qu’il ne fait vraiment pas trop tarder. Je croise trois jeunes femmes qui vont dans la direction opposée, soit le sommet du col. Je les informe de l’orage imminent et surprises, elles me disent ne pas avoir regardé les conditions avant de partir. Il est 14h15, et elles ont encore un bon 30 minutes de marche avant d’atteindre le sommet. Ça risque d’être extrêmement serré. Avant d’avoir été prise au piège avec mon amie sur un sommet à 2700 mètres dans les Dolomites dans un orage violent, je négligeais beaucoup ma sécurité par rapport aux orages. Je pense que le fait de vivre cette expérience traumatisante fait réaliser à quel point c’est la nature et les montagnes qui ont le dernier mot. Il est naïf de croire que nous pouvons braver les éléments en se passant plus fort que ceux-ci ou en se croyant immortels. Je leur explique que l’orage va frapper vers 15h00 et que le col est un endroit très exposé. Après, je ne peux pas en faire plus, ce sont à elles de prendre leur décision. Elles décident de continuer leur ascension en augmentant la cadence.
Vers 14h30, le ciel devient de plus en plus menaçant. Je ne me sens pas à l’abri dans la vallée et le stress commence à monter. J’augmente le rythme énormément, et progressivement, je distance Roel. Je sais qu’il y a un restaurant à environ 3 kilomètres d’où je suis. C’est mon objectif pour me protéger. Je suis en mode panique jusqu’à ce que j’entre dans une petite forêt. Je sais pertinemment qu’il est dangereux de se mettre à côté d’un arbre lors d’un orage, mais je m’y sens tout de même plus en sécurité comparativement à être un des points les plus hauts de la vallée.
Vers 15h00, je ne suis plus qu’à 800 mètres du restaurant. Une fine pluie commence à tomber, et je me dis qu’il n’y aura peut-être pas d’orages après tout. J’arrive au restaurant et je m’installe en attendant mes amis. La gérante du restaurant, en voyant mon signe de l’Hexatrek sur mon sac-à-dos, m’apporte le livre d’or du sentier et me demande si j’ai un endroit où dormir ce soir. Je lui dis que je comptais bivouaquer aux alentours, et elle me répond que je pourrais dormir dans la petite chapelle à côté du restaurant si je veux rester au sec. J’accepte en la remerciant chaleureusement. Génial, ma tente ne sera pas mouillée cette nuit!
Ça ne fait que 3 minutes que je suis installée, quand un flash lumineux déchire le ciel, et un tonnerre puissant se fait entendre seulement quelques secondes après. Wow, c’était à moins de 5 kilomètres d’ici. J’espère que tout le monde encore en montagne est correct.
Peu de temps après, un torrent de pluie tombe du ciel. Hugo et son ami entrent sur la terrasse du restaurant à ce moment. Ouf, ils sont corrects. Je leur demande où est Roel, ils me disent qu’il n’est qu’à quelques mètres derrière eux. Peu de temps après, la grêle se mêle de la partie (oui, j’ai bien dit la grêle, en plein été !) Heureusement que nous sommes arrivés à temps au restaurant!
Juste avant leur arrivée, j’ai commencé à discuter avec un couple qui effectue leur première longue randonnée. Je les introduis et nous prenons place autour d’une table. Rapidement, nous réalisons que ces deux randonneurs n’ont aucune expérience en rando multi-jours et qu’ils ont apporté un sac-à-dos beaucoup trop chargé: près de 25 kg chacun! Ils n’ont pas apporté de sac de couchage ou de manteau de pluie. Ils auront froid. Nous leur donnons un maximum de conseils pour la continuation de leur aventure. J’espère de tout cœur qu’ils seront corrects et qu’ils seront tout de même en mesure d’apprécier leur expérience.
Après un bon 20 minutes, Roel apparaît au restaurant. Lorsque la pluie a commencé, il est allé s’abriter dans la première maison qu’il a vu et les propriétaires l’ont invité à boire un thé.
Les orages et la pluie se calment un peu, mais semblent être loin de s’arrêter. Roel, Hugo et son ami décident de louer un Airbnb dans le village d’en bas. Il leurs resterait 4 kilomètres à parcourir, mais des clients du restaurant leur offrent un lift en voiture. Pour ma part, je les rejoindrai demain matin.
Je proprose au couple de randonneurs de dormir dans la chapelle, ce qu’ils acceptent avec enthousiasme. Nous passons donc la nuit dans un drôle de refuge étroit !
Jour 74: un drôle de covoiturage et repos forcé
Le lendemain matin, je me réveille vers 6h00. Le ciel est encore très menaçant et en consultant la météo, il est indiqué qu’il y aura des orages à presque toutes les heures de la journée. Je dois redescendre en ville pour retrouver mes amis, donc je n’ai pas vraiment le choix de continuer d’avancer (après soyez rassurés, je ne prends pas de risques inutiles, si je marche, c’est que je me sens en confiance). Heureusement la descente est très peu exposée et principalement dans la forêt. J’attends que les orages (qui ont commencé à 7h00) se calment un peu et vers 8h00, je m’élance dans le sentier. Le tonnerre gronde seulement par intervalle de 10 minutes, mais ça ne m’empêche pas d’être extrêmement stressée. J’ai hâte de rejoindre mon petit groupe, d’autant plus que Roel a cuisiné des crêpes et m’en a gardé pour mon arrivée.
Je dévale la descente en moins d’une heure (la peur est un puissant moteur, il faut croire), et complètement trempée, j’arrive au Airbnb de mes amis. Ça sent les bonnes crêpes. Je fais même fondre du chocolat sur celles-ci, c’est franchement délicieux. Ce deuxième petit déjeuner ouvre le bal d’une journée avec plus de nourriture avalée que de kilomètres…
Tous ensemble, nous décidons que la journée d’aujourd’hui sera un néro (une journée avec très peu de kilomètres). D’une part, parce qu’il ne sert parfois à rien de braver le mauvais temps, et d’autre part parce que le refuge proche du Mont Thabor (notre objectif de demain), est complet autant en refuge qu’en bivouac. Lorsqu’il annonce des orages dans la nuit, il est possible de bivouaquer, mais à proximité d’un refuge pour avoir un abri au cas où les choses tourneraient mal. Nous prenons donc la décision que, ce soir, ce sera nuitée au chaud dans le refuge les Tavernes dans le village de Valfrejus.
Pour s’y rendre, l’Hexatrek emprunte une route nationale en lacets avec aucun espace piéton. Roel a déjà emprunté ce passage et nous conseille fortement de faire du stop. Nous écoutons son conseil. Nous sortons un peu de Modane et nous levons notre pouce en l’air. Après une quinzaine de minutes, une première voiture s’arrête. Le conducteur nous indique qu’il n’y a que de la place pour deux personnes. Hugo propose d’attendre la prochaine voiture, et Roel et moi montons à bord.
Nous commençons à avancer et malheureusement, au premier tournant, le conducteur se trompe de bord et s’engage sur l’autoroute , au lieu de prendre la route vers Valfréjus. Et là, coup de théâtre! L’autoroute est complètement bondée. Rien n’avance. Et quand je dis rien, même pas d’un millimètre. Passe 5 minutes, puis 15, puis 30. En écoutant les nouvelles, nous comprenons qu’une automobile est tombée en panne dans un tunnel plus loin devant. Ouf, à ce rythme on va en avoir pour des heures. Pendant ce temps, Hugo nous texte : « je suis arrivée, vous êtes où? ». Très loin Hugo, très loin…
Nous sommes résignés à attendre quand l’automobile devant nous décide de faire un demi-tour à même l’autoroute. La manœuvre est téméraire, mais comme la voiture en partant a laissé un bon trou en avant de nous, notre conducteur décide prudemment de faire de même. Bon, pour la sécurité on y reviendra, mais au moins, nous voilà repartis en direction de Valfréjus. Au final, ce sera Hugo qui nous aura attendu pendant 30 minutes!
Revenons à ce que je vous disais un peu plus tôt. Aujourd’hui, j’ai faim. Très très faim et je mange continuellement.
Voici une aperçu de mon menu aujourd’hui:
+ Petit déjeuner 1: 3 pains au chocolat (chocolatine pour mes amis québécois), fruit et café
+ Petit déjeuner 2: 4 crêpes au chocolat (on ne dit pas non à des crêpes maisons)
+ Déjeuner 1: cappuccino, du porc et des patates (à 10h30, pourquoi pas) et un kilo de fraises (seulement 3 euros!)
Ps: mon repas de porc et patates était un repas précuisiné qui devait être réchauffé dans un micro-ondes. Spoiler alerte, je n’ai pas un tel appareil dans mon sac-à-dos. Solution? Demander à un restaurant si en échange de l’achat de café, ils peuvent me réchauffer mon repas. Marchandage réussi.
+ Déjeuner 2: guacamole et un sac complet de chips (oula, la guacamole, c’est un délice)
+ Déjeuner 3 : sandwich au fromage et guacamole (déjeuner 3 motivé par le fait qu’il ne reste plus de croustilles pour la guacamole et pas question que j’en jette une partie, donc sandwich guacamole/fromage, pourquoi pas !)
+ Dîner : les traditionnelles pâtes et l’apéro pour fêter les 1000 km d’Hugo!
Rendu en soirée, je commence finalement à me sentir repue.
Au refuge, nous fêtons les 1000 kilomètres d’Hugo sur le sentier. La pluie battante dehors nous fait apprécier notre décision de dormir en refuge ce soir. En plus, nous avons des lits méga confortables!
Après le souper, nous ne tardons pas trop, demain réveil prévu à 5h00 pour tenter l’ascension du Mont Thabor, un sommet à plus de 3100 mètres. Évidement, il annonce des orages vers 15h00, mais en partant à 6h00 demain matin, nous devrions avoir le temps sans problème de passer le col. Allez, c’est le temps de fermer les lumières, bonne nuit !